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mercredi 1er mars 2023

"La syndicaliste". Le film qui dévoile les perversions du nucléaire

La sortie en salles ce jour (1er mars 2023) du film "La syndicaliste" est l’occasion de poser les vraies questions concernant cette affaire mais aussi celle dite "Uramin" dans laquelle est impliquée l’ancienne présidente d’Areva, Anne Lauvergeon (jouée par Marina Foïs dans le film).

MàJ du 1er mars 2023 - Information donnée par "L’observatoire du nucléaire" : Affaire Kearney (film "La syndicaliste") : la piste de la corruption et non celle d’un "transfert de technologie" nucléaire…

Article ( en suivant le lien précédent vous aurez la possibilité d’avoir toutes les archives liées à ce texte).

La sortie en salles ce jour du film "La syndicaliste" est l’occasion de poser les vrais questions concernant cette affaire mais aussi celle dite "Uramin" dans laquelle est impliquée l’ancienne présidente d’Areva, Anne Lauvergeon (jouée par Marina Foïs dans le film).

La thèse avancée pour expliquer l’agression terrifiante dont a été victime fin 2012 Maureen Kearney (jouée par Isabelle Huppert) est qu’elle se serait opposée, à l’occasion d’un projet de vente de réacteurs EPR à la Chine, à un "transfert de technologie" en faveur de l’entreprise chinoise CGNPC et au détriment de l’industrie nucléaire française.

Cette thèse est absurde : il n’y avait aucun risque de "transfert de technologie" puisque Mme Lauvergeon, avait déjà bradé deux EPR à la Chine dès 2007 (voir explications ci-dessous). A cette époque, comme l’a illustré l’affaire de corruption Uramin (voir aussi ci-dessous), "Atomic Anne" était prête à tout pour vendre des EPR, et même quasiment les offrir, à d’éventuels clients.

Dès 2003, Lauvergeon avait ainsi bradé un EPR à la Finlande à 3 milliards d’euros pour un chantier qui coûte en réalité à la France entre 10 et 15 milliards (et qui devait être achevé en 2009 or, en 2023, le réacteur ne produit toujours pas d’électricité !) Elle pensait, de cette façon, "amorcer la pompe" et décider ainsi de nombreux autres clients potentiels à acheter enfin des EPR.

En réalité, aucun acheteur ne s’est manifesté pendant plusieurs années, jusqu’à ce que la présidente d’Areva ne se décide à brader à nouveau deux EPR, cette fois à la Chine, et pour la somme dérisoire de 3,66 milliards… les deux ! (Cf dépêche AFP du 30 juillet 2007, révélations faites par nous-mêmes, à l’époque pour le compte du RSN)

Ce n’est pas pour leurs "qualités" que les Chinois ont acquis les deux EPR français : cet achat venait simplement compléter leur marché, constitué en particulier de deux Candu-6 canadiens, de deux VVER russes, puis de 4 AP1000 américains et finalement de deux EPR. Les Chinois sont des gens méthodiques qui étudient jusqu’au moindre millimètre les installations qu’ils achètent, pour s’affranchir ensuite de leurs vendeurs et devenir eux-mêmes fabricants, ce qui est désormais le cas avec le réacteur chinois Hualong1.

Par ailleurs, les Chinois connaissaient de longue date les réacteurs français pour en avoir acheté dès les années 1980 (réacteurs de Daya bay, jumelés aujourd’hui encore avec ceux situés au Blayais en Gironde). Or, à part sa taille démesurée et ses complications inutiles, l’EPR, conçu à la fin des années 80 et au début des années 90, ne présente aucune différence fondamentale avec les réacteurs précédents.

On ne voit donc pas de quel "transfert de technologie" il aurait fallu s’inquiéter en 2012 lorsque Maureen Kearney a été agressée.

Il s’agit en réalité assurément d’une affaire de corruption dans laquelle la syndicaliste a "mis son nez"… à son détriment.

En effet, à part lorsque des EPR ont été bradés comme cela a été fait au profit de la Finlande et de la Chine, personne ne souhaite acheter de réacteurs EPR. Pour mémoire, alors que l’on peut lire ici ou là que "les Britanniques ont choisi le réacteur EPR", il faut rappeler que, avec l’argent des Français, EDF a d’abord racheté British energy à plus de 15 milliards… juste avant que la valeur de cette entreprise ne s’effondre lors de la crise financière de 2008. Ensuite, EDF… s’est commandée deux EPR à elle-même, pour les construire en Angleterre. Cela confirme qu’aucun client digne de ce nom ne veut acheter des EPR.

Il faut par ailleurs rappeler que, dès 2007, toujours avec l’argent des Français, Mme Lauvergeon avait fait racheter à grands frais par Areva l’entreprise Uramin, propriétaire de mines d’uranium… inexploitables. Les milliards ainsi évaporés devaient servir à "décider" des dirigeants d’Afrique du Sud à acheter des EPR… ce qui ne s’est jamais produit. En revanche, les milliards ont bel et bien disparu.

Anne Lauvergeon a été mise en examen dans cette affaire dès mai 2016 : cela va donc bientôt faire 7 ans et la dame, loin d’être jugée et incarcérée comme elle le mérite, parade dans divers médias où elle peut faire la promotion du nucléaire sans recevoir la moindre contradiction. L’affaire Uramin serait-elle enterrée ? Ou bien "Atomic Anne" comparaitra-t-elle à 91 ans comme M. Balladur dans l’affaire de Karashi ? On notera d’ailleurs que le bien nommé M. Fric (véridique !), accessoirement mari de Mme Lauvergeon, a gagné beaucoup d’argent au passage dans l’affaire Uramin et a été aussi mis en examen en 2016. Lui aussi court toujours impunément…

Concernant les méthodes d’Areva, rappelons aussi qu’elles ne tiennent pas toutes à Anne Lauvergeon. Pour mémoire, après avoir révélé des manœuvres relevant de la corruption au Niger de la part d’Areva, nous avons été attaqués en justice par le successeur d’Atomic Anne, Luc Oursel (joué dans le film par Yvan Attal), procès que nous avons remporté haut la main. Depuis, Luc Oursel est décédé et Areva a été démantelée… mais la vérité reste toujours à faire concernant ces affaires de corruption sur fond de délitement de l’industrie nucléaire française.


MàJ du 18 septembre 2022 - Golfech : la radioactivité de 2016 pénalisée par la cour d’appel de Bordeaux

Un article de NEXUS

 En 2016, la centrale nucléaire de Golfech, dans le Tarn-et-Garonne, a rejeté en quelques minutes une quantité très importante de radioactivité dans l’environnement. Le 9 septembre 2022, après un combat mené pendant des années par le Réseau Sortir du nucléaire et plusieurs associations pour tenter de faire reconnaître par la justice la culpabilité d’EDF, la cour d’appel de Bordeaux a condamné la compagnie à réparer le préjudice moral subi par les associations.

48 000 euros : c’est la somme reçue par des associations comme le Réseau Sortir du nucléaire qui se sont battues pendant des années pour tenter de faire reconnaître par la justice la culpabilité d’EDF. Une victoire en demi-teinte, car EDF n’a pas été sanctionnée pénalement pour ce rejet toxique et n’est pas tenue légalement de faire bouger les lignes afin d’éviter que cela ne se reproduise.

◆ Dépassement du seuil autorisé

Le 19 octobre 2016, la centrale nucléaire de Golfech a laissé s’échapper un important rejet radioactif gazeux. La radioactivité rejetée a monté en flèche, au point de dépasser pendant 2 minutes le seuil d’alarme à la cheminée. Au total, 136 milliards de becquerels ont été relâchés dans la nature, dont 78 milliards sur cette seule séquence de 2 minutes. Ce dépassement n’est pas à prendre à la légère : les seuils de rejets, taillés « sur mesure » selon les propositions de l’exploitant, sont fixés très haut, en fonction d’un optimum économique et technique, et non de normes sanitaires.

Par ailleurs, selon certains chercheurs, de tels pics de rejets sont susceptibles d’entraîner des problèmes de santé chez les riverains.

Selon eux, des pics de rejets pourraient expliquer le surcroît de leucémies aux alentours des installations nucléaires (voir notamment les travaux de Ian Fairlie et Alfred Körblein sur le sujet). Plusieurs études font en effet état d’une telle corrélation. (Voir l’étude allemande KiKK en 2007 et l’étude de l’Inserm parue en 2012. Plus d’informations.)

◆ D’inquiétants dysfonctionnements

D’après le Réseau Sortir du nucléaire, cette pollution était « le résultat d’une série de dysfonctionnements aussi bien techniques qu’organisationnels, révélateurs d’une sûreté défaillante. Les gaines contenant le combustible nucléaire du réacteur 1, censées être parfaitement étanches, laissaient fuir la radioactivité. Ce problème était connu de l’exploitant depuis juin 2016. En outre, le dégazeur, qui permet de séparer les gaz radioactifs des effluents liquides afin que ceux-ci puissent être stockés pendant 30 jours minimum pour permettre la décroissance de la radioactivité, avait été mal utilisé et avait mal fonctionné. En conséquence, ces gaz avaient alors été rejetés directement dans l’environnement. »

Sachant que certains gaz nécessitent plus de 50 jours pour voir leur radioactivité divisée par 1 000, le non-respect de cette procédure n’était pas anodin. « Un tel rejet n’avait donc rien d’“évanescent” », pour reprendre l’expression de l’avocat d’EDF en première instance.

◆ Une aventure juridique pendant six ans

Des associations ont refusé qu’une telle pollution reste impunie. Après un dépôt de plainte le 28 novembre 2016, le Réseau Sortir du nucléaire a fait citer directement EDF devant le tribunal le 17 octobre 2017. L’Association française des malades de la thyroïde, les Amis de la Terre Midi-Pyrénées, France Nature Environnement Midi-Pyrénées, France Nature Environnement 82, la Sepanlog et Stop-Golfech-VSDNG se sont constitués partie civile.

Le 10 janvier 2019, malgré des faits accablants, le tribunal de police de Montauban a relaxé EDF.

Face à cette décision qu’elles ont jugée incompréhensible, les associations ont fait appel. Le 10 février 2020, la cour d’appel de Toulouse a reconnu qu’EDF avait bien commis des fautes dans le cadre de cette affaire, mais ne l’a pas condamnée.

Les associations ont alors déposé un pourvoi en Cour de cassation, accompagné d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Le 29 juin 2021, l’arrêt de la Cour de cassation a rouvert la voie à une potentielle condamnation pour EDF.

Le 1er avril 2022, une nouvelle audience s’est tenue à la cour d’appel de Bordeaux. Dans un arrêt rendu le 9 septembre 2022, celle-ci a reconnu les fautes commises par EDF et l’a condamnée à réparer le préjudice subi par les associations de protection de l’environnement du fait de l’atteinte aux intérêts collectifs qu’elles ont pour objet de défendre.

◆ Une impunité et des risques qui continuent

Si les associations se félicitent dans leur communiqué de presse du 12 septembre 2022 de cette condamnation, notons qu’EDF n’a pas été sanctionnée pénalement pour ce rejet toxique : c’est une condamnation uniquement civile et pécuniaire qui a été obtenue.

La situation à la centrale nucléaire de Golfech, année après année, continue d’inquiéter.

En 2022, l’Autorité de sûreté nucléaire considère toujours que les performances de la centrale en matière de sûreté nucléaire laissent à désirer, comme en témoigne un grand nombre d’incidents survenus en 2021 ; elle fait également état de « défauts de compétence et de maîtrise des activités » concernant la maintenance. Enfin, des défauts de corrosion sous contrainte sont soupçonnés sur le réacteur no 1.

Nous avons demandé à Marie Frachisse, la coordinatrice des affaires juridiques du Réseau Sortir du nucléaire si cette décision qui reconnaît la responsabilité d’EDF allait changer quoi que ce soit à l’état de la centrale et aux risques de fuite en cours et à venir, et si EDF allait devoir faire des réparations pour que ça ne se produise plus. « Non. Cette condamnation a surtout un poids moral et dissuasif et elle permet, par la médiatisation de l’affaire, que le grand public soit informé de ce type de pollution et des causes de celle-ci. »

Dans l’idéal, « c’est une condamnation pénale qui aurait dû être prononcée si dès la première instance, le juge avait reconnu la culpabilité d’EDF. C’est au final une condamnation uniquement civile qui a été obtenue du fait que seules les associations ont fait appel du premier jugement. »

Quelles dispositions devrait prendre l’État pour éviter ce genre de rejet radioactif ? Pour Marie Frachisse, la réponse est claire : « Arrêter le nucléaire. »

👉Retrouvez le communiqué du 12 septembre 2022

👉Retrouvez le dossier juridique

Article par Estelle Brattesani pour NEXUS


MàJ du 31 août 2022 :
Si le Covid ou la guerre en Ukraine ne vous font plus tressaillir, jetez un coup d’œil sur les nouvelles du nucléaire et d’EDF pour retrouver l’état d’anxiété qui vous manquerait. Et si ce n’est pas le cas évitez de lire ces nouvelles :
http://www.observatoire-du-nucleaire.org/IMG/pdf/revue_de_presse_-_ete_2022.pdf


Mai 2022
En avril 2015, à la faveur d’un changement de dirigeants (*), Areva (**) informait l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) que la cuve du réacteur EPR de Flamanville, fabriquée depuis plusieurs années et déjà installée dans le réacteur, était en réalité défectueuse.

Suite à cet aveu, des investigations ont permis de mettre à jour pendant plus d’un an de nouvelles révélations sur les pratiques criminelles d’Areva et l’incurie (voire la complicité) de l’ASN : il a été ainsi montré que des milliers de pièces défectueuses ont été produites et souvent installées dans divers réacteurs en France et à l’étranger. Pire : d’innombrables documents de certification ont été falsifiés, parfois grossièrement, sans que l’ASN ne s’aperçoive de quoi que ce soit (***).

Tant et si bien que, le 4 mai 2016, comme en atteste la dépêche AFP du même jour, l’Observatoire du nucléaire déposait une plainte en justice contre Areva et contre l’ASN pour "Faux, usage de faux et mise en danger de la vie d’autrui."

Il est à noter que c’est six mois plus tard (voir article ci-dessous) que l’ASN a à son tour déposé plainte, assurément pour essayer de se placer dans le camp des accusateurs et non celui des accusés. Cette petite manœuvre ne devrait pas tromper la justice... si jamais celle-ci se souvient qu’elle doit instruire les plaintes et faire toute la lumière sur cette affaire gravissime.

Aujourd’hui, 4 mai 2022, cela fait six ans jour pour jour que la plainte de l’Observatoire du nucléaire a été déposée et la justice ne donne toujours aucune nouvelle de ses investigations... si elles existent !

Observatoire du nucléaire

(*) Areva savait depuis des années que la cuve était défectueuse et a maintenu secrète cette information pourtant cruciale, mais ce n’est qu’après le départ d’Anne Lauvergeon et le décès de son successeur Luc Oursel que l’aveu a été fait auprès de l’ASN qui, elle, n’avait rien vu (ou rien dit...)

(**) Areva est devenue Orano depuis : l’industrie nucléaire a souvent changé les noms des entreprises ou sites déconsidérés...

(**) L’ASN n’a donc rien découvert par elle-même, contrairement à une légende savamment entretenue pour maintenir dans l’opinion l’idée que le nucléaire français serait "parfaitement contrôlé"...


MàJ 28/02/2022 : Instrumentaliser la guerre poutinienne pour tenter de promouvoir l’atome est cynique, irresponsable et absurde.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie est une nouvelle occasion pour les promoteurs du nucléaire de mettre en avant leur industrie fétiche, parée de toutes les vertus.

La construction de nouveaux réacteurs est ainsi mise en avant pour lutter contre le changement climatique… alors que ces chantiers ne seraient pas achevés avant 2040. De même, le nucléaire serait la solution face à l’envol des prix de l’énergie alors qu’il est d’ores et déjà acquis que les coûts de production des futures centrales seront prohibitifs.

Et voilà aujourd’hui que l’invasion de l’Ukraine par la Russie démontrerait la pertinence de l’option nucléaire imposée depuis plusieurs décennies en France. Quant à l’Allemagne, elle serait désormais confrontée à une erreur majeure, celle d’avoir choisi la fermeture de ses centrales nucléaires et d’avoir parié sur le gaz, en particulier le gaz russe, pour assurer sa transition énergétique en attendant de fonctionner un jour avec 100% d’énergies renouvelables.

Il est certes exact que, comme ceux du blé ou de l’aluminium, les prix de l’énergie s’envolent depuis le déclenchement de l’attaque russe. En outre, les pays qui importent du gaz russe - dont la France ! - risquent de devoir se passer subitement de cette ressource, entrainant assurément un envol des prix, voire des pénuries. L’Allemagne va assurément être confrontée à d’importantes difficultés. Pour autant, le nucléaire est-il l’option "magique" apte à protéger la France ? Certainement pas.

Commençons par rappeler que, tous les hivers, la France est fortement importatrice d’électricité, en particulier… depuis l’Allemagne, et ce malgré nos 56 réacteurs nucléaires, ou plus exactement à cause d’eux : l’option "nucléaire + des millions de chauffages électriques" entraine de tels pics de consommation que la production nucléaire française est largement insuffisante.

Ce phénomène s’aggrave d’ailleurs chaque année avec le vieillissement des réacteurs et les pannes de plus en plus nombreuses et inquiétantes. Pour mémoire, EDF est actuellement obligée d’arrêter de nombreux réacteurs suite à la découverte de corrosions de systèmes de sécurité.

Si l’Allemagne ne peut plus exporter d’électricité suite aux conséquences de la guerre en Ukraine, la France va de fait se retrouver en situation critique. Encore est-il heureux que l’hiver touche à sa fin, mais il est très probable que de nouveaux hivers arriveront fin 2022 et les années suivantes !

Rappelons aussi que, même avec la production nucléaire la plus importante au monde - les USA comptent plus de réacteurs mais ils produisent moins de 20% de l’électricité du pays, contre 65% en France - le nucléaire ne couvre que 15% de la consommation française d’énergie. C’est d’ailleurs bien pour cela que les Français sont frappés comme leurs voisins par l’envol des prix du pétrole, du gaz, et de l’électricité : le nucléaire ne nous protège absolument pas.

Les promoteurs de l’atome en déduisent bien sûr que, pour que cette protection fonctionne, notre production nucléaire doit augmenter fortement. Mais, comme signalé plus haut à propos du climat, il faudra attendre au moins jusqu’en 2040 pour que de nouveaux réacteurs entrent en service. Poutine aura alors près de 90 ans !

De plus, des dizaines de réacteurs actuels auront été fermés d’ici là, trop délabrés pour être indéfiniment rénovés à grand frais par EDF. On nous parle beaucoup ces derniers temps d’une électrification massive de notre économie, mais ce ne sont pas les 6 à 14 nouveaux réacteurs annoncés par M. Macron - cela ne coûte rien en période électorale ! - qui permettront un tel basculement : il en faudrait en réalité dix ou vingt fois plus !

Or, outre son aspect insensé - démultiplication des risques de catastrophe et de la production de déchets radioactifs - ce projet est totalement hors des capacités d’EDF sur le plan financier - l’entreprise est d’ores et déjà terriblement endettée - et sur le plan industriel - incapable de construire un seul réacteur, le fameux EPR de Flamanville, comment EDF en ferait-elle des centaines ?

Mais l’incapacité du nucléaire à nous protéger, de façon générale et tout particulièrement en période de crise géopolitique, est évidente pour d’autres raisons que les déficiences d’EDF.

Il est même évident qu’un pays très nucléarisé comme la France est en réalité hautement vulnérable. En effet, qui peut raisonnablement écarter l’hypothèse dramatique d’une guerre qui toucherait le territoire français ? Alors que l’armée russe vient de prendre possession de la tristement célèbre centrale nucléaire ukrainienne de Tchernobyl, comment ne pas envisager que des centrales françaises soient attaquées ou bombardées ?

La France possède certes des armes atomiques, mais comment permettraient-elles de protéger nos centrales nucléaires ? En atomisant les attaquants… sur notre propre sol ?

Et même sans en arriver là, il est notable que la France nucléaire est d’une immense vulnérabilité du fait de la centralisation extrême de sa production : l’électricité est transportée sur des centaines de kilomètres par des lignes très haute tension (THT) dont les pylônes, situés pour la plupart en rase campagne, peuvent être dynamités avec la plus grande facilité. En une nuit, un groupe paramilitaire ou terroriste peut mettre la France à genoux. Et qu’on ne nous accuse pas de "donner des idées à nos ennemis", cette vulnérabilité extrême est connue de toute personne qui suit les questions d’énergie.

A contrario, les énergies renouvelables peuvent être déployées de façon harmonieuse et décentralisée sur tout le territoire, et continueraient à fonctionner en grande majorité même si plusieurs régions étaient attaquées. Cette résilience est d’ailleurs aussi de mise face aux évènements climatiques.

Instrumentaliser la guerre poutinienne pour tenter de promouvoir l’atome est cynique, irresponsable et absurde. Que ce soit face au péril climatique, à l’envol des prix de l’énergie ou aux crises géopolitiques, il est clair que la seule option d’avenir passe par le triptyque sobriété (éliminer les consommations non indispensables), efficacité (consommer moins d’énergie pour un même besoin) et énergies renouvelables.

Stéphane Lhomme
Directeur de l’Observatoire du nucléaire


MàJ 25/06/2021 - Communiqué de "Observatoire du nucléaire" : EPR 2 : la fuite en avant d’EDF ; y a-t-il un pilote dans l’avion du nucléaire ?

Alors qu’elle se montre incapable de mener à bien la construction du réacteur EPR, en chantier sans fin à Flamanville (Manche) depuis 2008, la direction d’EDF aurait néanmoins décidé, selon les informations publiées ce jour par le média Contexte(*), de dépenser des centaines de millions d’euros pour lancer la construction de réacteurs dits "EPR2".

Pourtant, bien que farouchement pronucléaire, le Président Macron a déclaré à plusieurs reprises qu’il fallait que l’EPR de Flamanville fonctionne avant toute décision de construire d’autres réacteurs. Mais il est très probable que M. Macron soit parfaitement informé et complice de la fuite en avant de la direction d’EDF.

Comme elle l’a souvent fait par le passé, méprisant la démocratie et les intérêts de la population française, la direction d’EDF entend user de la politique du fait accompli : il s’agit de dépenser des centaines de milliards en commençant un ou plusieurs chantiers de réacteurs "EPR2" pour affirmer ensuite que "le coup est parti" et que l’on ne saurait stopper un programme déjà lancé… sous peine de gaspiller des centaines de milliards.

Or, c’est précisément en construisant des réacteurs nucléaires qu’EDF gaspille des sommes astronomiques, comme l’a d’ailleurs fait auparavant Areva qui a fait faillite en particulier du fait du désastre industriel du chantier EPR de Finlande (commencé en 2005, il devait entrer en service en 2009… mais n’est toujours pas terminé !).

EDF prétendait maîtriser la construction de l’EPR en tenant compte des déboires d’Areva en Finlande, mais le chantier de Flamanville est lui aussi totalement catastrophique. Alors comment croire que, miraculeusement, EDF serait capable de construire des réacteurs EPR, qui plus est modifiés (d’où le concept d’ "EPR2") ?

Bien sûr, du point de vue antinucléaire, il est rassurant de pouvoir compter sur l’incompétence et l’incapacité manifeste d’EDF à construire des réacteurs nucléaires, mais il est injustifiable que soient ainsi gaspillés des sommes inouïes qui seraient tellement utiles dans les plans d’économies d’énergie et de développement des énergies renouvelables.

Au contraire, avec ses projets nucléaires délirants, la direction d’EDF emmène directement l’entreprise vers la faillite et, comme c’est le cas pour Areva (renommée Orano), ce sont les citoyens qui compensent ces pertes abyssales. Si ce programme "EPR2" n’est pas stoppé au plus vite, il aboutira à un nouveau désastre industriel et financier.

La moindre des choses de la part du Président de la République actuel, à supposer qu’il ait une conception correcte de la démocratie, est qu’il interdise à la direction d’EDF (qui est une entreprise à capitaux d’Etat à 85%) de lancer ce nouveau programme nucléaire avant l’éventuelle mise en service de l’EPR de Flamanville.

Mais bien entendu, la meilleure décision serait d’annuler tous les projets de nouveaux réacteurs et d’engager immédiatement la fermeture rapide des 56 réacteurs qui menacent chaque jour la vie des Français et de la majorité des Européens, produisant des déchets radioactifs pour lesquels n’existe aucune solution et servant de prétexte à une répression totalitaire contre les citoyens qui s’opposent à leur enfouissement (projet Cigéo à Bure, dans la Meuse).


21/02/2020 - Tarn-et-Garonne : nouvel incident déclaré à la centrale nucléaire de Golfech. C’est le premier de l’année, un incident technique sur la position des grappes de commandes du second réacteur de la centrale nucléaire de Golfech, a obligé la direction à signaler un événement de niveau 1 à l’autorité de sûreté nucléaire (ASN). Depuis plusieurs mois, le site nucléaire tarn-et-garonnais est dans le collimateur du gendarme du nucléaire, le nombre d’incidents techniques obligeant parfois à l’arrêt des réacteurs s’étant multipliés en 2018. La suite ici dans LDDM.


12/02/2020 - On a frôlé la catastrophe à Golfech en octobre 2019.

Un banal oubli lors de la maintenance d’un réacteur nucléaire de la centrale de Golfech, dans le sud-ouest de la France, a rapproché dangereusement l’installation « d’une situation d’accident ». Un incident qui aurait pu mal tourner dans une centrale nucléaire pointée du doigt pour son laxisme.

Comme tous les 18 mois, le réacteur n°2 de la centrale nucléaire de Golfech (Tarn-et-Garonne) doit renouveler un tiers de son combustible. Mais une cascade d’erreurs va engendrer des défaillances importantes de sûreté qui auraient pu affecter le refroidissement du combustible nucléaire. Il faudra une journée entière aux équipes d’EDF pour s’en rendre compte et réagir.

Voici dans quel contexte l’incident s’est déroulé :
Journal de l’Energie


Centrale nucléaire : en 2019, 33 incidents ont été déclarés à Golfech. Voir LDDM


(03/03/2018) par les Amis de la Terre MP :
Dimanche après midi, 4 mars venez à 14h devant la centrale de Golfech re-re-re-re-dire que le nucléaire est sale et que vous n’en voulez pas... avec Kolin Kobayashi notre copain japonais qui viendra faire le point sur Fukushima.

Golfech, si loin, si près (à la vitesse des radiations) !


Suite à "l’incident" de la centrale (voir ci-dessous), plusieurs associations [1] portent plainte contre EDF. Pourquoi ?
Le CEA était parmi les associations présentes.

Des questions sans réponse

- 28 novembre 2016

À ce stade, EDF n’a apporté aucune précision sur des faits pourtant d’intérêt public :

  • Quelle est la cause de ce rejet ? S’agit-il d’une erreur humaine ? D’un dysfonctionnement de l’installation de traitement ? Faut-il faire un lien avec un problème évoqué en septembre par des représentants de la centrale devant des membres de la Commission Locale d’Information, à savoir une gaine de combustible nucléaire endommagée qui contamine l’eau du circuit primaire ?
  • Quel était le niveau de radioactivité dans le bâtiment des auxiliaires nucléaires lors de l’intervention sur l’installation à l’origine de ce rejet ?
  • Quels ont été les gaz radioactifs rejetés ?
  • Enfin, pour quelle raison EDF a-t-elle dissimulé ce rejet si longtemps ?

Pour que ce rejet radioactif ne reste pas impuni, et afin que le Parquet puisse commencer une enquête, 9 associations portent plainte aujourd’hui contre EDF.
Un point presse se tiendra le 1er décembre juste avant l’assemblée générale publique de la CLI de Golfech, vers 19h30 devant la salle de réunion (82400, Pommevic).

Consulter la plainte <http://www.sortirdunucleaire.org/IMG/pdf/plainte_rsn_golfech_281116-2.pdf>


Les faits :

Un incident est intervenu le 19 octobre à la centrale nucléaire de Golfech, dans le Tarn-et-Garonne. EDF ne l’a révélé que 5 jours plus tard...

EDF évoque un « événement significatif pour l’environnement ». Dans un communiqué publié ce lundi 24 octobre, le producteur et distributeur d’électricité a révélé un incident survenu le 19 octobre à la centrale nucléaire de Golfech, dans le Tarn-et-Garonne. Pendant deux minutes, l’un des deux réacteurs a libéré des rejets radioactifs dans l’atmosphère supérieurs à la limite autorisée. Mais « Aucun impact sur l’environnement ni pour le personnel du site » n’a été détecté déclare le gestionnaire.

« Une alarme, située en salle de commande, confirme que le seuil réglementaire de rejet à la cheminée (fixé à 4 MBq/m3) a été dépassé », lors d’une intervention dans un bâtiment de l’unité de production numéro 1, indique le texte. L’opération en cours a été « immédiatement arrêtée », selon EDF. D’après l’entreprise, « ce dépassement de seuil a duré deux minutes et les balises de surveillance de l’environnement situées en zone nucléaire et autour de la centrale n’ont détecté aucun impact sur l’environnement ni pour le personnel du site. »

Par ailleurs, EDF indique avoir fait une déclaration à l’Autorité de sûreté nucléaire <http://www.asn.fr/> et à la Commission locale d’information le 21 octobre, soit le surlendemain de l’incident.


Envoyé par Amis de la Terre MP :
Hubert CROS : Le calcul le plus pédagogique que je puisse exposer :

L’alarme indique un dépassement de la limite autorisée pendant 2 minutes, durée relativement brève à l’échelle de l’année.

L’équipement qui cumule le volume émis indique 0.3% du total annuel.

Ces nombres, petits, ne disent rien de la gravité du dépassement.
L’année dure environ 500.000 minutes et correspond à 100% autorisé.
On divise par 100 : 5.000 minutes correspondent à 1% relâché, donc 500 minutes c’est 0.1% relâché.
En temps normal pour relâcher 0.3%, il s’écoule donc 1500 minutes. Si on lâchait cette quantité en une minute cela signifierait un débit 1500 fois plus important que le débit maximal autorisé.

Si cela à duré 2 minutes alors il faut deux fois moins de débit soit en moyenne sur 2 minutes un débit 750 fois plus élevé que le débit maximal autorisé.

Il est vraisemblable que le débit de la "sur-fuite" n’était pas constant, par moment plus faible, à d’autres plus intense. Cela fait près de trois ordres de grandeur et l’équipement de mesure peut très bien saturer et ne plus mesurer correctement le dépassement. Dans le cadre de la transparence, il faudrait se faire communiquer les données qui garantiraient que la mesure a été possible.
------------------------------------------------------------------------------------------Les Amis de la Terre Midi-Pyrénées, L’Association Françaises des Malades de la Tyroïde, le Réseau Sortir du Nucléaire, la CRIRAD..etc..
Étudient un dépôt de plainte


Le constat de l’ASN


Le nucléaire est d’autant moins sûr que l’autorité qui la gère (dont EDF) ne publie pas les données en toute transparence !
Le CEA appuie toutes les demandes pour diminuer l’apport du nucléaire dans le mix énergétique jusqu’à la fermeture de toutes les centrales nucléaires.


[1Réseau "Sortir du nucléaire", France Nature Environnement, Stop Golfech-VSDNG, Les Amis de la Terre Midi-Pyrénées, FNE 82, Sortir du nucléaire 82, SEPANLOG, France Nature Environnement Midi-Pyrénées, Association Française des Malades de la Thyroïde, le CEA

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